vendredi 16 octobre 2009

Que reste-t-il de nos cent ans ?



Le Wikiconcours « flash » de septembre dernier a été l’occasion pour l’équipe à laquelle je participais de se plonger dans l’histoire de notre ville : Rennes. Déjà, il y a un an de cela, nous avions constaté que notre cité plus que bimillénaire méritait mieux que l’article indigent qui lui était consacré dans Wikipédia. Notre angle d’attaque de cette année était les personnalités marquantes de l’histoire de la ville, et plus particulièrement ses maires.

Le problème est que l’on est vite confronté aux limites d’internet quand il s’agit de parler de l’histoire récente. Les règles de la Toile faisant que l’on est soit dans une logique de promotion immédiate de ce que l’on fait1, soit dans un souci de valorisation du patrimoine historique à travers les sites plus ou moins mis à jour des érudits locaux ou les inventaires abscons du patrimoine. Par contre, il est très rare d’y trouver trace de ces élus locaux qui ont contribué à la construction d’une cité. Il n’y a pas de mystère ; il faut alors retrouver les bonnes vieilles sources écrites.

Le problème c’est que quand on a mis le doigt dans l’engrenage, on se fait vite happer. Ainsi, je me suis attaché à la personne de Jean Janvier, premier édile de la ville de 1908 à 1923, qui est connu de tous les Rennais pour avoir donné son nom à l’imposante avenue qui part de la gare vers le centre-ville. Coup de bol, ce sympathique notable de la Troisième république a vu ses mémoires publiées il y a quelques années par les excellentes Presses universitaires de Rennes2. Par contre, baser entièrement un article sur cette source, ça fait un peu léger… Du coup, il n’y a guère d’autre solution que d’explorer les journaux de l’époque, notamment la collection complète des Ouest-Éclair qui occupe une entière armoire de microfilms au dernier étage des Champs Libres. Et là, c’est le drame…

Dans une langue qui sent bon les encriers et le sarrau troisièmerépublicain, on voit s’entrechoquer la politique étrangère et le banal accident de circulation ; quand la mise en coupe réglée du Maroc se retrouve à avoir autant d’importance que la mort de la veuve Denis dans un accident place de Bretagne. Et puis surtout, les joutes électorales de l’époque sont un ravissement : la menace de l’invasion bolchevico-maçonnique de la tranquille préfecture d’Ille-et-Vilaine est brandie quand le fort modéré socialiste Carle Bahon se retrouve au poste de premier magistrat en 1925.
On voit aussi en 1908, le ravissement de la presse locale quand un aussi honorable personnage que M. Janvier, déjà chevalier de la Légion d’honneur, accède au bureau de maire de la ville. Mais, au fait, qu’apprenons-nous de l’honorable Eugène Pinault3 qui l’a précédé en 1900 ?
Et c’est reparti pour un tour, on file chercher la bobine de mai 1900 et on retrouve encore les craintes qu’inspire l’Allemagne, les joies de la progression de la civilisation dans le Maghreb grâce à nos régiments coloniaux… et les accidents de circulation sur les quais encombrés de la Vilaine. Et aussi, on lit la satisfaction de voir une personnalité telle que M. Pinault mener les destinées de notre cité à l’orée du nouveau siècle.

Que fait alors le modeste wikipédien ? Il prend des notes, scanne les pages et se dit qu’il a, encore, les bases d’un nouvel article à écrire. Sera-t-il lu un jour ? Peu importe, ça fait toujours un lien rouge en moins !

1 : Dans ce cas aucun problème pour tomber sur le blog du plus obscur conseiller général, ce qui n’est pas sans poser des problèmes de neutralité, sans parler de l’admissibilité
2 : Jean Janvier (préface de Edmond Hervé), Quelques souvenirs, Presses universitaires de Rennes, coll. « Mémoire commune », Rennes, 2000, 339 p. (ISBN 2-86847-550-7). Édition, présentation et annotations de Jean-Yves Andrieux et Catherine Laurent.
3 : Aucun rapport avec un autre honorable M. Pinault, plus contemporain, qui ne sera sans doute jamais maire de Rennes.

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